jeudi 16 octobre 2014

Siavash Amini - What Wind Whispered To The Trees


Sortie : 6 octobre 2014 | Label : Futuresequence

Après une cassette sortie en février dernier, Till Human Voices Wake Us aussi vaporeuse que réussie, l’Iranien Siavash Amini réalise un disque au titre non moins évocateur, What Wind Whispered To The Trees, paru chez les Anglais de Futuresequence

Si son goût pour les notes qui sonnent comme des gouttes légères embuées de halos de vapeur n’a pas faibli, son travail sur la consistance des textures et des nappes a développé une tournure nouvelle. Lestés d’une charge dramatique menaçante, les drones de guitare se sont étoffés de reverbs qui construisent à elles seules des monuments de matière vacillante. What Wind Whispered To The Trees prend pour thème deux romans de Dostoïevski, Les Démons et Les Frères Karamazov, et cette trame y est sans doute pour beaucoup dans cet assombrissement. A ce titre, le splendide morceau d’ouverture, The Wind, s’illustre en particulier, dressant des colonnes de fumée grondante, qui s’épanchent en un ciel maculé de suie. Une progression quasi épique fait intervenir au sein de ces émanations un fil mélodique aigu, lyrique, qui introduit imperceptiblement le violon douloureux de Nima Aghiani. La tension s’adoucira par la suite sans jamais se défaire de ce sentiment tragique, de cette impression funeste de faille, laissant planer l’attente du moment de la déchirure. 

Au delà de l’étoffe même des drones qui charpentent cet album, la beauté perçue doit beaucoup aux incursions néo-classiques auxquelles donnent lieu les méandres de cordes. Les grésillements viennent parfois moduler, à la façon d’un vibrato, les plages amples et graves que trace le violon. Plus tard, l’instrument gagne le premier plan, léchant la toile comme un pinceau hardi. L’équilibre, combinaison sobre mais si complexe, se créé alors entre l’élan noble et poignant des cordes, la pesanteur des bourdons de guitare et les mélodies opalines qui luisent en fond. Pour ne rien gâcher, le mastering du vénérable Lawrence English apporte à l’objet un grain inimitable. L’ambient de Siavash Amini est de ceux qui parlent, vibrent et font écho sur le champ, évoquant mille choses, recoins et  références que l’on touche du doigt sans chercher à les nommer. Influencé également par la philosophie, par Barthes, comme par l’Iran du Sud, le musicien n’en compose pas moins une musique aussi nébuleuse qu’équivoque, susceptible d’être absorbée et comprise sous l’angle de multiples sensibilités. Bulle introspective et substantielle, What Wind Whispered To The Trees est de ces cabanes haut perchées dans lesquelles on ne se recueille qu’en compagnie de la rumeur des bois. 

Manolito


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