mercredi 24 juillet 2013

True Widow - Circumambulation


Date de sortie : 23 juillet 2013 | Label : Relapse Records

La chaleur est écrasante, l'hygrométrie bien trop importante, de quoi se sentir à l'étroit, cerné par sa peau et jamais à sa place. Dans ces conditions, il s'agit avant tout de flinguer les degrés. Pour ce faire, la belle pochette noire de Circumambulation est la promesse d'une parcelle suffisamment ombragée. On connait True Widow, sa déclinaison toute personnelle et légèrement dépressive du shoegaze qu'il aime pimenter de grosses guitares. On peut évidemment trouver ailleurs nettement plus lourd et nettement plus original mais le groupe s'habille d'un minimalisme élégant et d'une lenteur salutaire qui, dans mon cas, font mouche. Une esthétique manifeste fondée sur le Less is more. Une basse grondante et mortuaire, une guitare plombée, une batterie très lente, deux voix qui se succèdent et le tour est joué. Pas d'effets, peu de circonvolutions, rien de compliqué, juste le trio qui avance droit devant, lentement, avec une grâce toute pachydermique. Ses morceaux calqués sur cette dynamique : froids, lourds, lents et simples. Avec un petit plus accordé aux mélodies qui accrochent suffisamment l'oreille pour y revenir souvent. Ce qui fait la singularité du groupe texan, c'est qu'il emprunte un peu à tout - pêle-mêle de sludge, doom, stoner, post-rock, shoegaze, post-punk et drone (liste non exhaustive) - sans être rien de tout ça. Pas assez lourd pour faire du doom, ni assez gras pour faire du sludge mais bien trop lourd et gras pour que l'on puisse leur affubler l'étiquette post-rock et ainsi de suite. C'est très bien comme ça. On pourrait bien sûr leur reprocher de manquer de substance, d'être trop timorés s'il n'y avait derrière tout ça un réel talent d'écriture pour accoucher de morceaux pelés et vraiment efficaces.

Dès l'entame, Creeper pose les bases de Circumambulation : une grosse basse, un riff tout à la fois sombre et flippant et quelques breaks. C'est sinistre mais pas glauque et ça fonctionne. S:H:S laboure le même sillon avec une voix toutefois bien plus éthérée et post-punk. Le morceau semble patraque, au bout du rouleau mais l'ambiance demeure assez oppressante. Elle s'aère légèrement à la faveur de Four Teeth. Sans doute est-ce dû à l'entrée en lice de Nicole Estill (la bassiste) au micro, dont le timbre est plus typiquement indie-rock. En revanche, en-dessous, ça reste sec et légèrement lourd. Bref, le disque joue sur les nuances et les contrastes tout en gardant le même climax huit morceaux durant. True Widow alterne passages gras et légers, frontaux et retenus, longs et courts sans jamais se départir de sa vitesse de gastéropode épuisé, ni de son air renfrogné. On a parfois l'impression d'entendre Swell qui copule avec Earth, un My Bloody Valentine qui aurait troqué ses ondes pour des gouttes de lourdeur, un Jucifer monomaniaque et sexy. Circumambulation est le premier disque du groupe estampillé du logo Relapse et constitue certainement la sortie la moins metal du label cette année. Pour autant, sa présence sur le mastodonte américain n'est pas vraiment surprenante : intrinsèquement, la musique de True Widow appartient effectivement à ce monde-là. En revanche, en préférant l'approche larvée plutôt que l'attaque frontale, il est vrai qu'il faut bien chercher pour trouver les crocs de l'animal. Ils sont pourtant là, bien planqués, et sortent à la faveur d'un riff énorme ici (celui de Creeper par exemple), d'un tempo martelé et spartiate là (Trollstigen quand la voix se tait) et ne laissent aucun doute quant aux intentions du trio : trouver la jugulaire.

Avec sa violence subliminale et sa noirceur en filigrane, son austérité qui lui confère une vraie froideur, son côté hypnotique (l'instrumental I:M:O) et ses morceaux à rallonge, Circumambulation tend à monopoliser la platine. Alors bien sûr, True Widow est tangentiellement metal, tangentiellement sombre et tangentiellement méchant mais on peut arguer que la subtilité se cache parfois dans la valeur approchée, que la férocité, lorsqu'elle est suggérée, peut avoir autant d'impact qu'un crochet du droit. On reprochera sûrement au groupe de n'être pas assez, il est pourtant bien suffisamment et atteint même avec cet album le parfait équilibre qui, par le truchement d'une suite d'absences, lui donne toute sa densité.

Vivement recommandé, cela va de soi.

leoluce


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